J'attendrai longtemps

Il pleut sur ma vitre. Avant il faisait beau, avant 15h. Le nuage est arrivé, nonchalamment, avec l’air de dire ”J’emmerde les hommes, les citadins et les vieux croulants !”. Il est gris, comme un costume de type à valise. J’ai hésité. Je n’ai rien contre les types à valise, ils vivent malgré eux, c’est tout. Je n’ai pas de valise et je suis planté derrière une vitre. À regarder les gouttes glisser et se suivre à la queue leu-leu. Les carreaux sont un peu sales, je suis fatigué.
J’ai fait une connerie, je crois. Mes pensées sont floues. Mes souvenirs tournent sans arrêt. Des visages, des visages, toujours les mêmes ! Et leurs mots articulés, qui me susurrent à l’oreille les choses que j’attends. J’attends, c’est cela. J’attends. J’attends. J’attends. Je ne les cherchaient pas EUX précisément. Je cherchais des gens. Je cherchais une présence. Pas eux. Me suis laissé embobiner, comme un bleu. Voilà le résultat.
J’ai fait un dessin avec eux dedans. Pas très ressemblant cela dit, on dirait des gens lambda. Qu’ont ils d’exceptionnel d’ailleurs ? Pourquoi est-ce qu’ils m’obsèdent ? Ils me donnent de l’attention. Pfffiuuu. Je me sens misérable. Les premiers venus et BAM ! J’en peux déjà plus. Mais j’en veux encore. Plein. Beaucoup. Je m’étais résigné à ne pas abandonner, par orgueil. Là, c’est pire qu’avant.
Je vais me laisser glisser, et attendre. Tout ce que je peux faire.
J’ai envie de les voir. Facile, un message et c’est parti. Mais non, ça ne marche pas comme ça. Ils vont voir la supercherie. Ils vont m’abuser. Me tromper. Me moquer. Me reprocher. Me rejeter. M’oublier. Non, c’est trop risqué. Je ne veux pas mourir comme ça. Mourir dans la honte. Mais mourir dans le regret... Je vais les emmerder, comme le nuage. Moi le premier, et toc !