Ecrire, c'est manquer

J’écris car je manque. Je manque d’amour, d’alcool, de drogues, de joie. L’écriture est l’acte le plus égoïste qui soit. On écrit comme on baise : pour combler une vie que l’on sait vide et fade, amère et ennuyeuse. Personne n’écrit pour quelqu’un et je préfère l’honnêteté d’une personne qui écrit pour l’argent que celui qui se répand en bons sentiments en disant qu’il écrit pour la personne qu’il aime.

Écrire c’est hurler au monde que l’on a un vide dans le cœur, dans l’âme et dans l’esprit. Écrire c’est se sentir sale, immonde, tas de merde, de fantasme et de colère. L’inspiration vient de la Muse. La muse n’existe pas : elle est le produit fantasmé d’un être mal-en-point qui se sent mourant dans une vie qu’il trouve trop ordinaire.
L’amour a quitté l’écrivain, car il l’a investie dans une illusion qu’il couche sur le papier. Écrire c’est baiser une idée en espérant que ça ira mieux demain. On n’éjacule pas quand on écrit, mais seulement quand on n’en ressent plus l’envie, quand cette bête agonisante au centre de notre poitrine cesse enfin de hurler et se meurt dans un doux silence.

Écrire c’est avoir du courage malgré tout. Le courage de ne pas claquer une dernière fois cette porte qui nous semble si bien, celle qu’on appelle la mort. Écrire c’est se dire qu’on n’a pas fini de donner notre testament, on sait qu’on n’a fini un paragraphe mais tout n’est pas dit, le malaise est encore présent.
Écrire c’est baiser, baiser c’est écrire. J’aimerais changer mon papier blanc pour une feuille exotique à l’océan noir de ses cheveux. Sentir non plus la froideur créatrice mais la chaleur de son encre. Écrire c’est ouvrir son cœur aux autres.

Je regrette ce jour où j’ai pris la plume, assis en cours de philosophie, ce vendredi de février 2014. Ce moment où j’ai trouvé un sens à ma vie, où j’ai crevé un abcès. J’aurais dû savoir que la plaie s’infecterait qu’elle m’éloignerait du monde, que je ressentirais un malaise. Je suis prisonnier de la muse, qui est la seule femme avec qui je m’amuse.

Pour le monde, je suis gentil, mignon, sensible. « Tu en trouveras une. ». Illusion, j’ai donné mon cœur au monde, j’ai fait acte de courage et cela se voit dans mes actions. J’ai l’air faible mais je tiens mentalement. Mais c’est si dur par moments. On se sent à côté, pauvre et bête, souvent abandonné.

Écrire c’est une maladie, j’ai dit ça il y a des années. Mais j’avais si tort. Écrire c’est un symptôme et un déclencheur. On décide de hurler qu’on manque. Et seule l’encre parvient à nous combler. Mais à peine une lettre est sur le papier que je sais que ce n’est pas assez. Plus, toujours plus. Et plus j’écris moins je comprends le monde. Je ne vois qu’une issue de malheur, de silence et de tristesse. Mais moins j’écris, plus elle hurle. Cette bête qui se meurt dans ma poitrine. Ma fille, ma tortionnaire.

Muse, un jour tu me laisseras peut-être, mais j’espère que c’est toi qui me quitteras. Et non pas moi, qui avec force, la porte, claquera.

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amigre
amigre
4 ans

Je rajouterai d'ailleurs que c'est encore pire si et quand tu as déjà eu l'impression (qu'elle soit réalité ou pas) d'avoir une muse dans ta vie. Quand l'inspiration était à ce point débordante qu'elle ressemblait à un flot incessant, un torrent de montagne tumultueux avec ses tourments, ses éclaboussures, avec ses rochers contre lesquels parfois tu viens t'écraser.
Quand tu as passionnément laissé les mots couler, que tu as accumulé des quantités de choses que tu regardes ensuite avec une sorte de dépit, avec envie, avec l'impression sauvagement profonde qui t'arrache les tripes que tu n'arriverais plus à écrire aussi bien, que tu ne pourrais plus ressentir tout ça. L'impression par moment que ça n'était pas toi derrière ces mots.
Commence alors la vrai dépression, la fuite en avant, le renfermement ou la réponse du junkie, celle de chercher une autre muse, chercher à revivre ça, chercher qui pourrait encore t'ouvrir l'âme et le corps en deux et te permettre de revivre un peu, ou entièrement cette folie.
Avec comme tu le dis l'impression d'être rongé de l'intérieur, que tout ce qui sort de toi n'est plus qu'un jus noirâtre insipide et malodorant alors même qu'avant c'était un nectar coloré d'un parfum exquis.
L'écriture s'est aussi se déchirer comme une feuille, et aucun scotch ne permet de recoller les morceaux.

amigre
amigre
4 ans

C'est assez dingue comme je pense ceux qui ont connus ça font trouver ces mots pertinents
Je n'aurais pas exprimé ça comme ça de moi même et pourtant;

Arzhman
Arzhman
4 ans

C'est beau, merci

rollei2
rollei2
4 ans

je vis ça
chacun sa prose et l'histoire qui va avec
tu résumes bien le feel qui est le mien avec quelques variantes sur les raisons...
pour ma part, je laisse le robinet ouvert encore pour quelques temps
la différence, c'est que tu laisses te lire, je n'en suis pas là (plus maintenant et pas encore...)
merci mec

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