Mon amie Berry

Aujourd'hui j'aimerais vous parler de ma meilleure amie, dont j'utiliserais le surnom, au cas où : Berry.

Je l'ai rencontrée à un pique-nique entre français, quand je vivais encore à Londres. Au début, comme noooombres de représentantes du sexe féminin que je rencontre, je me suis dit "je me la taperais bien". Pensée que de nombreux hommes ont eu/ont/auront envers la gente féminine au cours de leur vie. Elle, elle pensait juste que j'étais un gros con. Et puis, le temps passant, on parlait de plus en plus (très souvent via whatsapp, un peu en se voyant en réel). Un lien avait fini par se créer, nous étions désormais amis.

Un jour où j'allais très mal, je me sentais le besoin de sortir, mais pas seul. je lui avait envoyé un message, un peu en désespoir de cause (j'avais pris l'habitude de plus demander à qui que ce soit, suite à différente déception passées quant aux réponse à mes demandes d'aide même les plus simples. La plus blessante ayant été "Je peux pas venir il me reste des devoirs à faire pour l'université". Autant dire que je m'étais bien renfermé après différente réponses de cet acabit). Je m'attendais à une réponse négative, agrémentée d'une excuse bâteau. Et pourtant, je fus surpris : "ouaip pas de soucis !"

A ce moment, je la considérais comme une très bonne amie, parce qu'elle avait accepté du temps avec moi pour me faire aller mieux. Et ça pour moi, habitué à la solitude et aux déserteurs, ça m'a touché. Énormément touché même.

Au fil des mois, on parlait tous les jours sur whatsapp, de tout et de rien. Surtout de rien en fait, mais ça ne me dérangeait pas. Le fait qu'elle me raconte des pans banals de sa vie me tenait compagnie et rompait ma solitude et mon morne quotidien (bon, j'exagère un peu, mais vous saisissez l'idée du gars qui a du mal à socialiser).

Nous sommes même partis en vacances plusieurs fois ensemble : Disneyland pour mes 30 ans, Barcelone, Portugal, petite ville anglaise.... Que nous deux à chaque fois. Souvent dans la même chambre. Nous n'étions pas particulièrement attirés l'un par l'autre, donc rien ne s'est jamais passé. En fait, elle est de base très peu câline, elle aime pas trop qu'on la touche, et ce depuis qu'elle est gosse. Même sa mère se faisait refouler quand elle voulait une accolade.

D'ailleurs, j'ai rencontré sa mère quand elle est venue lui rendre visite. Et Berry a pu rencontrer mes parents quand eux sont venus me voir. D'ailleurs, comme je l'avais expliqué dans une box précédente, elle a fait l'interprète entre eux et la docteure quand j'ai passé des tests d'autisme. Ça aussi ça m'a touché, qu'elle accepte de me rendre ce service peu facile à effectuer.

On se voyait aussi en physique de temps en temps. Elle m'avait invité par exemple à son anniv' il y a 2 ou 3 ans, où elle avait réuni quelques autres personnes. Un peu pompette, elle m'avait pris dans ses bras en me disant de pas m'en faire et qu'il y avait des gens qui m'aimaient et appréciaient, elle incluse.

Un soir où j'allais vraiment mal (oui à nouveau), elle m'avait appelé le lendemain pour s'assurer que j'vais pas mis fin à ma vie (chose qui m'avait traversé l'esprit la veille). Et ça aussi ça m'a ému. On échangeait que par messages et vocaux interposés ; le fait qu'elle m'appelle directement m'a profondément mis la larme à l'œil (j'essaie d'éviter les répétitions avec "ça m'a touché", mais ça devient difficile).

En somme, elle avait dépassé le stade de bonne amie. A mes yeux, elle avait atteint un stade que je n'ai jamais donné à qui que ce soit : meilleure amie. Et c'était réciproque. Elle n'envoie pas autant de messages à tout le monde, pas même à sa famille. Elle est aussi devenue ma confidente, et j'étais le sien. Elle est la seule de mon entourage à savoir certaines choses sur moi, et moi sur elle.

Et puis vint le moment où je quittais Londres, en septembre 2023, pour m'envoler vers le Japon (spoiler : ça a duré qu'un mois avant que je revienne en France. Voir la box que j'ai faite à ce sujet pour découvrir une aventure (pas) passionnante). Quelques semaines avant, sa mère l'avait appelée alors que j'étais à côté :

- Ton meilleur ami va bientôt partir à l'autre bout du monde, tu te sens comment ?
- Ben, c'est son rêve, c'est ce qu'il veut faire, je peux pas trop le retenir.

La veille de mon départ, je passais la journée avec elle. Au moment où je partais, elle est venue d'elle-même me serrer fort dans ses bras. J'étais très surpris, et vraiment, mais vraiment touché. Elle qui déteste le contact venait d'elle-même me dire au revoir de la plus câline des façons possibles. Ça m'a vraiment fait chaud au cœur.

Depuis mon départ, on est restés en contact quasi tous les jours, de la même façon qu'avant. Partageant principalement nos routines ennuyeuses, nos joies, nos peines, et nos confessions.

Mais depuis quelques jours, une peur a commencée à monter en moi ; la peur de la perdre. La raison derrière cette peur est toute bête : elle a rencontré un mec qui lui plaît.

Berry m'a souvent confié ses histoires de cœur qui lui arrivaient depuis qu'on se connait. Elle voulait sortir avec un gars qui lui plaisait, avait fait plusieurs pas vers lui, mais lui était trop timide ou ne comprenait pas ses intentions. Elle avait eu quelques amourettes qui ne durèrent pas plus qu'une poignée de semaines à tout casser, et encore. Parfois un coup d'un soir.

Quelques jours avant qu'elle ne rencontre cet homme, je lui avait proposé l'idée de peut-être faire une coloc ensemble un jour, vu qu'on savait comment vivait l'autre depuis nos diverses vacances ensemble. Quitte à ce que je revienne en Angleterre, vu qu'elle ne veut pas du tout revenir en France. C'était une idée un peu à la volée, mais que j'envisageais quand même.

Et donc quelques jours auparavant elle me dit avoir matché avec un gars sur Hinge. Elle me dit qu'elle a rdv avec lui, qu'il lui plait bien, etc etc.... Elle avait déjà un plan cul depuis quelques temps, alors je me dis que ça sera sans doute à nouveau un gars de passage.

Et pourtant, à la fin de son premier rancard, elle me fait un résumé très flatteur du bonhomme : il est sympa, il est beau gosse, lui aussi veut partir de Londres pour aller dans une autre ville anglaise (Berry en a marre de Londres mais veut rester en Angleterre. Elle vise Newcastle, en dessous de l'Écosse, mais n'essuie que des refus à ses candidature de boulot vu qu'elle n'est pas sur place), et en plus sa mère possède une baraque dans le Kent (région anglaise à 2h au sud est de Londres), et elle se demande si elle ira vivre avec lui là-bas dans le futur.

C'est à ce moment-là que j'ai eu un haut le cœur. Vivre avec lui ? Genre, comme un vrai couple ? A ce point-là ?

Mais si elle est vraiment en couple, on se parlera moins ? Voire plus du tout ? Parce que si elle est maquée elle sera plus attentive envers son conjoint non ? Surtout si lui est à côté d'elle et moi à 1000 km.

Je lui répond alors de ne pas se précipiter, qu'elle s'emballe peut-être un peu en se projetant autant (ce qu'elle fait parfois dans diverses situations). Elle me dit qu'elle ne s'est jamais sentie aussi bien avec un gars en rdv, qu'elle l'apprécie énormément, etc etc... Elle lui a parlé vite fait de moi, et il a répondu qu'il croit en l'amitié homme/femme, lui-même ayant deux amies qu'il considère comme ses sœurs.

Elle a eu deux nouveaux rdv avec lui depuis, ils se sont embrassés, ont marché un peu ensemble, les trucs de rancard quoi.

Et j'ai vraiment, vraiment peur de la suite. C'est ma meilleure amie, je veux que son bonheur. Mais si ça implique qu'on se parle beaucoup moins, est-ce que c'est mal de pas vouloir que son histoire marche ?

Je lui en ai parlé, lui disant que je ressentais un forme de jalousie envers ça. Pas amoureuse, mais plutôt affective. Elle m'a assuré que ça ne changera rien du tout, je lui ai dit que je l'aimais en tant qu'amie, et me répond qu'elle aussi. Mais j'ai quand même peur.

C'est pas seulement ma meilleure amie. C'est aussi ma seule amie tout court. J'ai quelques potes, de bons potes aussi ; mais je suis extrêmement prudent avec le mot "ami", je ne le donne pas à n'importe qui. Elle rompait ma solitude quotidienne infernale, elle est mon anti-pensée noire (noire de type "je devrais mettre un terme à tout ça").

Je me suis alors posé la question : "Et si j'étais en fait amoureux d'elle ?". L'idée m'a d'abord parue saugrenue, mais plus je me repose la question, moins j'arrive à avoir de réponse claire. Pourtant je sais qu'on ferait pas un bon couple du tout. On a certes des points communs, mais on a aussi de nombreuses différences pas vraiment compatibles. La plus criante étant qu'elle n'aime pas les câlins, alors que moi j'adore ça.

Pourtant, je me prends depuis quelques jours à fantasmer sur elle, à imaginer certains pans de ma vie avec elle à mes côtés. Est-ce que c'est juste passager ? Est-ce que je n'aurai plus ces pensées dans quelques temps ? Je me dis aussi que je me fait trop d'idées quoi qu'il en soit, que ça peut très bien être une autre amourette de passage, ou que même si ça marche on sera toujours en contact comme à l'accoutumée.

Peut-être est-elle devenue au fil des années un de mes points de repère dans la vie et, que son changement soudain me fait perdre ce repère. Ma boussole s'affole d'elle-même, et mettra du temps à pointer à nouveau vers le Nord.

C'est ma meilleure amie Berry. Je l'aime amicalement. Peut-être amoureusement ? Ou pas amoureusement. Mais ça je ne lui ai pas dit. J'ai peur de la perdre. Je suis sûrement juste un idiot qui s'en fait trop pour pas grand chose.