Les époux Arnolfini 1434

Peinture sur bois 82,2 X 60 cm de Jan van Eyck conservée à la National Gallery de Londres.

Le petit chien griffon attire beaucoup le regard. Il fait écho au diablotin à la tête grimaçante et au lion symbole de la résurrection. Les mains des personnages se lient exactement entre le diablotin et le lion. Le chien est symbole de la fidélité conjugale. Il ne se reflète pas dans le miroir.

Au dessus de la scène éclaire le lustre pourtant richement décoré à six branches, une bougie vivante au dessus de l’homme. Une bougie morte au dessus de la femme.

L’histoire que l’oeuvre nous vend est celle d’un mariage. On devine l’image du reflet des témoins, au nombre de deux, vêtus de rouge et de bleu dans un miroir situé au fond de la pièce. Les mains des personnages ne se rejoignent pas dans ce reflet. Ce miroir fait 5 cm sur le tableau.

La beauté de ce tableau réside dans le vertige procuré par la mise en scène de ce que voit “l’oeil du témoin de mariage”. En effet, le peintre ne représente pas du tout la scène en cours dans sa propre réalité, à savoir lui-même en train de peindre la scène, mais ce qu’il serait en train de se passer dans une réalité parallèle à la nôtre, celle “du tableau”. De plus, nous savons qu’un miroir ne ment pas. Or il ne reflète, ni le chien, ni les mains jointes.

L’effet de ce petit miroir déformant, en “oeil-de-poisson”, est une mise en abîme vertigineuse qui me transporte autant que l’effet vertigo d’Alfred Hitchcock. Et à ce propos, les médaillons autour, au nombre de dix, racontent la crucifixion. Ils ont été peints avec un pinceau muni d’un unique crin. La lumière pénétrant les perles de cristal composant le chapelet, en la concentrant sur le mur, les détails de l‘ombre du miroir, les petites maisons visibles à l’extérieur dans la fenêtre, dans le miroir… Quelle minutie.

Les personnages sont intrigants, bien qu’ils puissent vraiment être des mariés, on pourrait soupçonner un scénario beaucoup plus troublant. Que cet homme à la carrure impressionnante et au couvre-chef disproportionné de croque-mort, de son geste de la main, ne promettait rien, ne se protégeait de rien, mais entravait la fuite de l’âme de cette défunte par la fenêtre, ou la protégeait de sa main du mauvais oeil. Comme s’il avait perdu son épouse adorée. Et si ces personnages, ou l’un des personnages était mort ? Et si cette femme enceinte était morte en couche ? Leurs regards ne se croisent pas ! Et si cet homme vêtu en grand deuil, avait commandé ce tableau, plein de nostalgie d’une période heureuse et révolue à jamais, pour commémorer une APPARITION DE SA FEMME ! Au purgatoire, les âmes se couvrent d’autant de feux que leur péchés, de rouille comme le rouge de l’ameublement à droite de la pièce. Les prières et les aumônes des vivants permettent d’abréger les souffrances des défunts au purgatoire. La gauche de la pièce est baignée d’une lumière paradisiaque, on distingue dans la fenêtre un arbre fruitier. L’homme est-il entre sa femme et le paradis ? Vient-elle d'obtenir de son mari de prier pour son âme au moment où son âme est tiraillée entre le diablotin grimaçant et le lion de la résurrection ? Au moment où le serment est scellé, sa main est-elle noire, brûlée, et sa fumée s’envole-t’elle vers la lumière, comme il semble qu'elle soit peinte dans le reflet du miroir ?

Au centre du triangle isocèle quasi parfait composé par les visages et les mains est écrit “Jan Eyck fut ici en 1434.” Pourquoi ? Parce que Jan Van Eyck est le personnage principal ? L’un des témoins ? A juste été présent dans cette pièce ? Avec son assistant ?

C'est la première scène privée picturale connue depuis l’Antiquité. Marguerite d’Autriche a demandé de la mettre sous clef, un peu comme la poupée Annabelle.

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