Le Baiser

Je donnais l'amour aux autres mais je me sentais si vide. J'accomplissais mon travail au nom de ma mère, accédant à ses caprices, déclenchant des guerres, réunissant des amants. J'offrais des rêves et détruisait des vies et cela dans un merci, sans félicitations. Jusqu'à cette mission : Subjuguer l'Âme, la rendre amoureuse de la Laideur, car la Beauté en est jalouse. L'Âme aujourd'hui plaît plus que le Corps, ce dernier n'est plus divinisé autant qu'avant. on loue l'esprit des gens intelligents, on plaint ceux qui restent beaux mais idiots.

J'ai pourtant été séduit par l'Âme humaine. Comment moi, Éros, puis-je devenir l'esclave d'une de mes flèches ? Car ce n'est pas moi qui l'ai tiré, mais ton regard. Ton regard brûlant de cette envie de me connaître. Comme si j'étais, non pas un instrument, mais un mystère, une énigme qui te faisait grandir avec ton désir.

J'ai caché notre union aux yeux du Corps. Je ne voulais pas qu'elle sache, qu'elle sache que tu me donnais la vie, la raison, que tu était la seule pour qui je voulais désormais tirer mes flèches. J'ai suivis tes conseils, et je me suis efforcé de créer du bonheur et tes sourires me faisaient trembler de joie.

Mais le Corps nous a trouvé, le Corps m'a séquestré loin de toi, et alors que tu voulais te donner la mort, tu as réussi à lui prouver qu'elle avait tort. Tu as montré que tu valais autant qu'elle et par notre union tu as montré que le monde se porte mieux sous notre gouverne. Mais tu t'es montrée aussi une gagnante intelligente, tu n'as pas mis le Corps au rebut : tu as travaillé avec elle afin de montrer que nous avons besoin des deux.

Notre douce fille, Plaisir, enchante notre couple, répandant son aura au sein de ce que nous formons. Ma douce Âme, cette blessure sur le torse, si ardente, je ne la regrette pas. Je t'aime tant et respire au souffle de tes lèvres.

Ainsi fini le mythe d'Éros et Psyché, par la naissance du Plaisir. Un doux baiser sur les lèvres, deux visages qui se font face. Les yeux ne sont le miroir de l'âme, seulement quand Amour les regarde. Le corps physique se noie dans la beauté de cette union et ainsi naît la volupté d'aimer.