"Daft Punk, des boucles dans une chambre d’enfant" (Le Monde) 2/5Des gens ont demandés la suite, la voici (en com') par contre pas trop si c'est le bon groupe

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Delixi
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La scène se passe en janvier 1993 dans un duplex de l’avenue Junot, à Montmartre. Elle est fondatrice pour deux adolescents et symbolise une émancipation porteuse d’une révolution musicale. Dans le rôle du père, Daniel Vangarde, producteur de variété pour Sheila et Ringo ou Joe Dassin, mais encore de disco et de musique antillaise. Le fils est Thomas Bangalter, futur Daft Punk. « Thomas avait sa chambre à l’étage inférieur, raconte le père. La mienne étant à côté, je l’avais insonorisée avec du plomb dans le mur avant sa naissance, en 1975, pour y faire de la musique. Quand je rentre, je m’aperçois que quelqu’un a touché les réglages. C’est un mauvais moment entre nous, mais je me suis mis à sa place. Je lui ai donné 8 000 francs pour son anniversaire – pour d’autres, cela aurait été une voiture ou une moto – pour qu’il s’achète du matériel. »

Avec l’argent, le fiston acquiert pour ses 18 ans un synthétiseur Roland Juno-106 et surtout un sampler Akai S01. Complétés par un clavier Minimoog cédé par le père, un séquenceur, une console de mixage et un compresseur. Méthodique, l’apprenti prend pour habitude de lire intégralement chaque notice. Puis il connecte l’ensemble des équipements, posés sur des tréteaux, à un ghetto-blaster, ces radiocassettes volumineuses par leur taille et leur puissance sonore. Dès lors, sa chambre sera un studio.

L’ajout d’un échantillonneur transforme radicalement la pratique de Thomas Bangalter et de son ami Guy-Manuel de Homem-Christo. Cet outil généralisé dans le rap permet de « sampler », c’est-à-dire d’utiliser des extraits sonores préexistants pour la création musicale, transformée en acte de citation et de collage. Dans son livre Sample ! Aux origines du son hip-hop(Le Mot et le reste, 2018), Brice Miclet distingue le producteur new-yorkais de hip-hop DJ Premier, réputé au début des années 1990 « pour sa science du chopping, pour son habileté à faire d’un sample très court une boucle bien pensée » . Le chopping vise à rendre l’emprunt méconnaissable – et donc à échapper à d’éventuelles poursuites judiciaires.

Daft Punk va exceller dans cette activité ludique. Mais sans s’y enfermer. « A partir du moment où on utilisait la technique du sampling, ça voulait dire pour beaucoup qu’on n’était pas compositeurs, qu’on ne savait pas écrire la musique, qu’on était seulement des DJ avec des platines , commente aujourd’hui Thomas Bangalter. Mais quand on voit le travail de Steve Reich avec des bandes et avec des samples… » Se référer à ce phare américain de la musique contemporaine, pionnier du courant minimaliste et répétitif, n’est pas anodin. Bangalter en tire cette conviction : « On était, Guy-Manuel et moi, compositeurs dès le début, avec des formes et des approches plus ou moins sophistiquées. »

Garcimore, l’entremetteur

Pour la génération électro, la rencontre entre Guy-Manuel de Homem-Christo et Thomas Bangalter a l’importance que revêtent, pour les précédentes, celle de John Lennon et de Paul McCartney lors d’une fête paroissiale à Liverpool, en 1957, ou celle de Mick Jagger et de Keith Richards à la gare de Dartford, près de Londres, en 1961. Là, ce sera le 6 juin 1986 au collège du lycée Carnot, dans le 17e arrondissement parisien. La jonction s’opère sur une base potache, raconte Bangalter : « Guy-Manuel m’a été présenté par un copain qui vantait sa parfaite imitation de Garcimore », vedette de la télévision de l’époque, un illusionniste espagnol connu pour son rire et ses tours foireux.

Fils de musicien, Bangalter joue du piano depuis l’âge de 5 ans. Avec le recul, il affirme néanmoins avoir « beaucoup plus baigné dans le monde de la danse contemporaine et classique que celui de la musique ». Sa mère, Thérèse Thoreux, qu’il perdra en 2001, a été en effet danseuse principale pour le Ballet-Théâtre contemporain, puis mosaïste. « Je suis allé peut-être quatre fois voir mon pèretravailler en studio, alors qu’on imagine que j’avais un rapport beaucoup plus proche de son activité de production, complète le musicien. En fait, je l’ai surtout vu composer des chansons au piano. » De son côté, Daniel Vangarde dément avoir transmis le virus du disco à son fils : « J’écoutais ça surtout en discothèque quand j’y testais mes productions. A la maison, c’était du reggae, des musiques indiennes et africaines… Et j’ai bien dû écouter cinquante fois Songs in the Key of Life, de Stevie Wonder. »

D’un an l’aîné de Thomas Bangalter, Guy-Manuel de Homem-Christo a, lui, des parents qui travaillent dans la publicité, autre domaine de compétence de Daft Punk. Le futur « Guy-Man » (« gars-homme », un diminutif de super-héros) trouve ses premiers émois dans la culture rock classique : Jimi Hendrix, The Doors, The Velvet Underground… Il est l’arrière-petit-fils de l’écrivain Francisco Manuel Homem Cristo Filho, propagandiste portugais de Mussolini, un anarchiste passé au fascisme qui sera, deux avant sa mort, une des figures du régime dictatorial né du coup d’Etat de 1926 à Lisbonne. A l’opposé des obsessions nationalistes de l’aïeul, le descendant incarnera une liberté de créer transfrontalière.

Avant Daft Punk, un premier groupe est monté pour épater les filles. Ce qu’indique son nom : Darlin’. Avec Laurent Brancowitz, futur guitariste de Phoenix, groupe qui sera lui aussi associé, à tort ou à raison, à ce qu’on nommera « French Touch ». Ce troisième larron relève une petite annonce à la boutique parisienne de Dancetaria, un label lillois spécialisé dans le rock indépendant. « J’ai rencontré Guy-Manuel le 1er janvier 1992 au McDo devant le jardin du Luxembourg, et ensuite j’ai habité pendant quelques années dans la chambre de bonne que louaient ses parents, se souvient « Branko ». On s’est retrouvés sur Bowie et le Velvet Underground, mais on admirait aussi les productions disco. On considérait comme un scandale que la musique soit aussi compartimentée. »

Darlin’ ne donnera qu’une poignée de concerts, le premier à Orsay (Essonne), pour la Fête de la musique 1992. Le répertoire comporte deux reprises instrumentales. Une version brutale de Darlin’, la chanson éponyme des Beach Boys, et Love Theme, des hard-rockeurs américains Kiss. « Reprendre du Kiss avait un côté un peu imbécile, convient Laurent Brancowitz, mais Guy-Manuel était fasciné par leur logo. Nous nous intéressions déjà aux projets conceptuels, Kraftwerk ou Bowie avec son personnage de Ziggy Stardust. » Il y a aussi Cindy so Loud, une composition qui pastiche le Velvet Underground.

Les chemins du trio vont bientôt se séparer, mais il laissera une trace discographique : Darlin’ et Cindy so Loud trouveront place sur une compilation éditée à 800 vinyles par le label de Stereolab. Laurent Brancowitz a pu glisser une cassette audio à Laetitia Sadier, la chanteuse française de ce groupe londonien, lors d’un concert au Rex Club, en mars 1993. Par chance, Dave Jennings, critique à l’hebdomadaire britannique musical Melody Maker, prête une oreille. Son jugement s’agissant de Darlin’ est sans appel : « Daft punky trash. » (« De la daube punk et stupide. ») « On a vécu cela comme un triomphe, se souvient Brancowitz. On avait l’impression que la seule vie possible était d’être dans la marge. » Ses deux facétieux camarades vont même brandir l’avanie en étendard. Le premier emprunt de Daft Punk est son nom.

Bangalter et Homem-Christo rêvaient des productions panoramiques des Beach Boys. Hélas, ils ne disposent pas des mêmes moyens. L’aggiornamento va être radical. Depuis le deuxième Summer of Love, une rave géante qui s’est éternisée d’un été à l’autre, en 1988 et 1989, le Royaume-Uni est pris de convulsions électroniques. Encore mineurs, les deux Parisiens rejoignent le mouvement en assistant, le 10 novembre 1992, à une soirée de musique house au dernier étage du Centre Pompidou. Les montées acides du duo allemand Hardfloor précipitent leur conversion.

Les emplettes des Parisiens les dirigent désormais vers le quartier de la Bastille, rue de Charonne. A la boutique de disques BPM (« battement par minute »). Ou chez Rough Trade, déclinaison d’une prestigieuse enseigne de Londres. Un des vendeurs est Arnaud Rebotini, qui obtiendra en 2018 le premier César pour un musicien d’électro avec la bande originale du film 120 battements par minute. En ces endroits, « il y a au maximum dix exemplaires de chaque disque, écrivent Pauline Guéna et Anne-Sophie Jahn, dans Daft (Grasset, 2022). Si on en rate un, peut-être qu’on ne l’entendra plus jamais. Ça crée une effervescence. »

Les futurs Daft Punk passent aussi à l’action. Daniel Vangarde se souvient que son fils « faisait des rythmes dans sa chambre avec Guy-Manuel » : « Mon partenaire Jean Kluger et moi, on trouvait ça original et fascinant. On était largués. Jean m’a dit : “Ils ne sont pas normaux.” »A l’été 1993, l’initiation se prolonge par un séjour sous le soleil d’Ibiza, place forte de la musique électronique, et des soirées au fameux Café del Mar. Le 26 septembre est organisé au parc Disne...

Delixi
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Les futurs Daft Punk passent aussi à l’action. Daniel Vangarde se souvient que son fils « faisait des rythmes dans sa chambre avec Guy-Manuel » : « Mon partenaire Jean Kluger et moi, on trouvait ça original et fascinant. On était largués. Jean m’a dit : “Ils ne sont pas normaux.” »A l’été 1993, l’initiation se prolonge par un séjour sous le soleil d’Ibiza, place forte de la musique électronique, et des soirées au fameux Café del Mar. Le 26 septembre est organisé au parc Disney, à Marne-la-Vallée (Seine-et-Marne), l’événement Dance Europe. Le duo écossais Slam, cofondateur du label Soma, y est programmé. On trouve, là encore, l’occasion de transmettre deux travaux musicaux, The New Wave(qui deviendra Alive) et Assault. Un maxi est commercialisé le 11 avril 1994 pour la première fois sous le nom de Daft Punk. Cette fois, la mèche est allumée : « Les trois premiers mois, nous avons vendu 12 000 copies, se souvenait Dave Clarke, pilier de Soma, dans Le Monde en décembre 2000. Tous les DJ le passaient, de Detroit à New York. »

« Vision mondiale »

Suivent deux bombes, amorcées en mai 1995 : Rollin’and Scratchin’ et Da Funk.Le 2 décembre, Daft Punk est intégré à un programme « French House » aux Transmusicales de Rennes. Dans la salle de l’Ubu, le duo passe à 17 heures devant 400 spectateurs. A visages découverts. Il reviendra l’année suivante dans ce festival, cette fois dans l’enceinte du Liberté, et ils seront des milliers. Son nom s’est répandu sur toutes les lèvres et affole l’industrie du disque. « Toute la planète voulait les signer », exagère à peine Maya Masseboeuf, alors directrice artistique chez Virgin France. La maison de disques part avec une longueur d’avance grâce à cette défricheuse, une des premières à repérer les prodiges : « J’avais entendu parler de Daft Punk par les gens du milieu électro. Leur live avait une énergie rock qui m’a procuré le même flash que quand j’ai vu Sonic Youth pour la première fois. J’ai eu tout de suite une intuition. »

Son enthousiasme est partagé par son patron, Emmanuel de Buretel. « Le titre qui m’a vraiment fait signer ce groupe estRollin’ and Scratchin’, affirme-t-il. J’écoutais tous les matins la cassette à fond dans mon bureau. Il y avait un côté D.A.F, un duo allemand que j’avais programmé dans mon école d’ingénieurs. Daft Punk apporte un effet tridimensionnel en travaillant sur la matière même. La musique est une sinusoïde, mais, chez eux, l’onde a plusieurs couches qui varient. »

Le buzz est tel qu’il place ces novices en position de force. « En général, tu écoutes un album avant de signer un artiste. Là, on les a signés pour qu’ils fassent un album », détaille Maya Masseboeuf. Apre en négociation, Daft Punk obtient de contrôler totalement sa production. « Ils gagnaient déjà de l’argent en vendant des dizaines de milliers de maxis dans le monde , raconte Daniel Vangarde. Je leur portais assistance au niveau des contrats pour qu’ils soient indépendants par rapport au show-business et que leur projet ne soit pas dégradé par des intermédiaires. Je leur ai dit de faire une liste de leurs exigences. Faire eux-mêmes leurs visuels, ne pas montrer leurs têtes puisque c’est ce qu’ils voulaient… A la fin, il restait trois maisons de disques. »

Emmanuel de Buretel est aussi séduit par l’aplomb des jeunes hommes. « Dès le début, ils avaient une vision mondiale et une idée conceptuelle de leur art, assure-t-il. C’est rare que les artistes associent d’emblée à ce point image et musique. Thomas est un génie de la machine, de la pensée et de la concision ; Guy-Man est un subjectif organique assez punk, qui a très bon goût et claque des mélodies qui tuent. »

Fruit de six mois de travail, de janvier à mai 1996, dans la chambre-studio de Thomas Bangalter, l’album Homeworkest présenté au même endroit à l’équipe de Virgin. C’est un hommage aux pionniers de la house music de Chicago, dont les noms sont scandés dans le titre Teachers: Derrick Carter, Green Velvet, Armando, Paul Johnson, Lil Louis… « Ces disques américains étaient importés en Europe et ignorés aux Etats-Unis », se souvient Pedro Winter, premier manageur de Daft Punk. Ce qui fascine, c’est l’appropriation que Daft Punk fait de ses influences. Elles sont digérées à travers un prisme déformant, que Thomas Bangalter comparera à celui des sound systems jamaïcains recrachant le rhythm’n’blues américain avec des basses telluriques.

Maya Masseboeuf est « soufflée » par le résultat. Elle estime pouvoir écouler ce premier album à 50 000 exemplaires, « avec une promo qui respecte leurs envies, un marketing reposant sur les autocollants et le vinyle » . Homeworksort le 20 janvier 1997 dans une quarantaine de pays et se vend à 2 millions de copies, dont 300 000 en France. On enchaîne aussitôt avec « Daftendirektour », une tournée nord-américaine et européenne, qui débute symboliquement sur une patinoire de Chicago.

Au sein de la communauté électro, les réactions devant cette ascension ne sont pas toujours bienveillantes. D’abord, il y a ce pacte avec le diable, une major du disque. Ensuite, le dogme de l’anonymat, inhérent à cette contre-culture, est soupçonné d’être détourné ici à des fins commerciales. « Quand la techno a commencé, les maîtres absolus de cette musique étaient Underground Resistance, un collectif de Detroit, expliquait le DJ et producteur de house Etienne de Crécy dans Le Monde en avril 2012. Leurs préceptes étaient clairs : Mad Mike portait une cagoule pour ne pas se montrer. Il disait : “La musique avant tout. Les artistes, ce n’est pas ce qu’il y a de plus important.” » C’était très anti-star-système, très anti-industrie de la musique. »

Dans les interviews données à leurs débuts, Bangalter et de Homem-Christo, qui excluent aussitôt la télévision, sont d’abord des vengeurs masqués s’approvisionnant dans des magasins de farces et attrapes .Cet aspect carnavalesque se rattache aussi à une tradition rock puisée dans le kabuki japonais. L’éclair zébré que David Bowie peint sur son visage en 1973 pour le personnage d’Aladdin Sane sera imité jusqu’à l’outrance par les maquillages de Kiss. Encore eux. Une affiche du groupe grand-guignolesque est d’ailleurs fixée au mur de la chambre d’ado que l’on découvre sur la photo intérieure de Homework. Sur le bureau est posé un globe terrestre.

Delixi
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Premiers émois

Et puis ils décident de se transformer en robots et de remplacer le masque par un casque. Pour le deuxième album, Discovery(2001), est imaginé un script lié à la crainte du bug de l’an 2000 : affairés dans leur studio, les DJ producteurs ont été victimes d’un accident le 9 septembre 1999 à neuf heures et neuf minutes. L’explosion de leur échantillonneur a nécessité une opération de chirurgie réparatrice. Le pitch s’inspire directement de leur film-culte , Phantom of the Paradise(1974), une tragi-comédie musicale de Brian De Palma mêlant au Fantôme de l’Opéra, de Gaston Leroux, le mythe de Faust et Le Portrait de Dorian Gray, d’Oscar Wilde. L’histoire d’un compositeur qui se fait voler sa cantate par un producteur sous contrat avec le Malin. Le malheureux, dont le visage a été atrocement défiguré dans une presse à disques, rumine ensuite sa vengeance sous une combinaison de latex noire et un casque d’oiseau argenté. Deux artifices que Daft Punk ajoute à sa panoplie.

Scénarisée, la métamorphose en robots n’en est pas moins logique : Daft Punk maquille les voix derrière un vocodeur, un traitement synthétique qui avait donné la parole aux Maschinenmenschen (« hommes-machines ») du groupe allemand Kraftwerk, référence incontournable pour la scène électronique. Conçus par les vidéastes Alex Courtès et Martin Fougerol, les casques, ainsi que des gants métalliques, seront finalisés à Hollywood par une entreprise spécialisée dans les effets spéciaux.

Homeworkpossédait une cohérence stylistique et avait atteint son but : faire apprécier la house et la techno aux masses. En comparaison, Discovery semble l’œuvre d’un savant fou, un docteur Frankenstein qui aurait assemblé les morceaux de quatorze monstres. Un enchevêtrement délirant de samples. Les identifier s’avère impossible, Daft Punk s’étant amusé à créer des sons pour les imiter. Le titre Discoveryn’en a pas moins été emprunté au groupe pop britannique Electric Light Orchestra, autre utilisateur du vocodeur, échantillonné deux fois dans le prodigieux disco-funk Face to Face. A moins que le titre de l’album ne se réfère au Discovery One, le vaisseau de l’odyssée spatiale de Stanley Kubrick, puisque nous sommes en 2001.

Selon Thomas Bangalter, Homeworkdéveloppait « une idée en dix minutes » . Cette fois, c’est « quarante idées en trois minutes ». Les styles peuvent cohabiter au sein d’une même chanson ou d’un même instrumental. Toute hiérarchie – beau et laid, noble et vulgaire – est abolie. La bacchanale convie aussi bien Bach que du hard-rock symphonique. Les réactions seront radicales, de l’émerveillement pour un objet postmoderne, sinon révolutionnaire, à l’effarement devant un capharnaüm.

Daft Punk affirmera avoir voulu retrouver l’innocence des premiers émois musicaux. Pour eux, cette période sentimentale couvre la décennie 1975-1985. Les dix premières années de leurs vies. Au passage, on provoque les aînés qui distinguent torchons et serviettes. « Dans son sens noble, le mot “pop” signifie pour moi la juxtaposition d’une multitude de genres, expliquera Thomas Bangalter dans Le Monde, en mars 2001. Un peu comme pouvait le faire Queen, capable de mélanger heavy metal, comédie musicale, disco… »

Bangalter complète aujourd’hui cette approche en renvoyant à son « livre préféré sur la musique », La Musique et l’ineffable(Seuil, 1961), de Vladimir Jankélévitch : « Il parle d’un auditeur spontané qui peut aimer plein de choses différentes dans cette sincérité qui est celle de l’enfance, où il n’y a pas le bon et le mauvais goût. » Et ce qu’écrit le philosophe et musicologue sied à Daft Punk : « La musique est à la fois expressive et inexpressive, sérieuse et frivole, profonde et superficielle ; elle a un sens et n’a pas de sens. La musique est-elle un divertissement sans portée ? Ou bien est-elle un langage chiffré et comme le hiéroglyphe d’un mystère ? »

Dans les meetings de Chirac et Jospin

Une des premières chansons achevées – dès 1998 – pour Discoverypropulse le duo au sommet des classements de singles, en France et même en Europe (l’Euro Hot 100, regroupant dix-sept pays). Plus aucune fête ou soirée n’existe désormais sans One More Time, ce disco chanté par l’Américain Romanthony qui réconcilie les générations. On l’entend même dans les meetings politiques. Jacques Chirac et Lionel Jospin en font usage pour la campagne présidentielle de 2002 avant que l’utilisation ne leur soit interdite. Daft Punk ne plaisante pas avec les autorisations. En même temps, le groupe sait tirer profit de la puissance virale de Napster, un réseau de partage de fichiers que l’industrie du disque a désigné comme l’ennemi numéro un. Le piratage a orchestré avec une redoutable efficacité la promotion de One More Time, que les radios ont diffusé avant même de le recevoir par la maison de disques. Virgin n’a pas bougé jusqu’à la sortie officielle du single, en novembre 2000.

« Thomas nous a présentéDiscovery, posé sur son lit,se souvient Pedro Winter, ancien manageur de Daft Punk. Ils ont fait une sorte de chef-d’œuvre dans une chambre d’enfant. » Un autre auditeur tient aussi à manifester son admiration sur le moment. A Los Angeles, Thomas Bangalter reçoit un appel non identifié sur son portable. Il entend la voix d’une de ses idoles. Nile Rodgers, bon génie du funk et du disco, souhaite rencontrer les deux Frenchies. « Qu’il ait aimé notre disque, c’est cent fois plus fort pour nous que de travailler un jour avec lui », confie, en février 2001, le Daft Punk au magazine Les Inrockuptibles. L’un n’empêchera pas l’autre. Et Nile Rodgers, c’est Chic.

Pouki
Pouki
8 mois

@Delixi:

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Schloren
Schloren
8 mois

@pouki Chuck Norris a tout lu, deux fois.

Pragma
Pragma
8 mois

Merci.

Walkshadow
Walkshadow
8 mois

Trop intéressant, merci beaucoup !

lpks
lpks
8 mois

3/5 ?
Thx

Delixi
Delixi
8 mois

@lpks: j'ai atteint le quota d'article gratos que je peux vous donner, my bad

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