Frances Haugen, la lanceuse d'alerte qui attaque Facebook.

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Zeptow
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2 ans

Facebook : Frances Haugen, une lanceuse d’alerte à la démarche très structurée

La spécialiste des « classements algorithmiques » a quitté le réseau social en emportant des milliers de documents de forums internes et organise, depuis ses révélations, une sortie médiatique et politique millimétrée.

Par Alexandre Piquard
Publié aujourd’hui à 18h37, mis à jour à 19h09
Temps deLecture 2 min.


La lanceuse d’alerte Frances Haugen arrive à son audition à la commission sénatoriale américaine, à Washington (Etats-Unis), le 5 octobre 2021.

« J’ai eu l’impression que, face à des conflits d’intérêts, entre ses profits et la protection des utilisateurs, Facebook choisissait de façon répétée ses profits. » Frances Haugen a expliqué ainsi pourquoi elle est devenue « la lanceuse d’alerte de Facebook » à la commission sénatoriale américaine qui l’auditionnait ce mardi 5 octobre. En mai, cette employée de 37 ans a décidé de quitter le réseau social en emportant des milliers de documents de forums internes.

Mme Haugen est une spécialiste des « classements algorithmiques » qui servent à hiérarchiser les contenus sur les plates-formes. Après un diplôme de management à l’université d’Harvard et des études d’informatique, elle a été embauchée par Google puis est passée par les réseaux sociaux Pinterest et Yelp, avant d’entrer chez Facebook, en 2019. Motivée par la « perte d’un ami tombé dans la désinformation », elle y a intégré l’équipe « civic integrity », chargée de lutter contre les « fake news » et les discours de haine, notamment dans les élections. Mme Haugen dit avoir ensuite été progressivement découragée, en raison de budgets trop limités ou de son impuissance à réduire les problèmes dans les pays en développement. Sa « goutte d’eau » aura été le démantèlement, fin 2020, de l’équipe « civic integrity » par Facebook, qui dit avoir réparti ses tâches dans d’autres services.

Huit plaintes déposées
Frances Haugen n’est pas la première employée de Facebook à démissionner, ni la première spécialiste de l’éthique à critiquer le business d’un géant du numérique. Ce qui la distingue est l’aspect très structuré de sa démarche. Elle a mis en place une séquence médiatique et politique millimétrée : enquêtes dans le Wall Street Journal, interview au magazine « 60 Minutes », diffusé sur la chaîne de télévision américaine CBS News, où elle se dévoile, audition devant la commission à laquelle elle a transmis ses documents…

Elle est de plus très soutenue par Whistleblower Aid, une ONG spécialisée dans l’aide aux lanceurs d’alerte, fondée par l’avocat John Tye, qui avait lui-même dénoncé des agissements de l’Agence nationale de sécurité américaine. Cette association s’appuie sur le statut protégé de lanceur d’alerte, créé par la loi Dodd-Frank de 2010, avec un bureau spécifique à la Securities and Exchange Commission (SEC). C’est d’ailleurs auprès de ce gendarme des marchés financiers qu’elle a déposé huit plaintes assurant que Facebook a menti aux investisseurs. Et Whistleblower Aid intègre aussi dans sa stratégie les « compensations » que la SEC peut accorder aux lanceurs d’alerte pour leurs informations, qui se comptent parfois en millions de dollars.

Une approche pragmatique assumée visant à éviter les conséquences et représailles subies par ceux qui dénoncent des pratiques internes. Mme Haugen prend d’ailleurs soin de répéter qu’elle ne hait pas Facebook ou Mark Zuckerberg, son fondateur, et elle assure vouloir maintenant aider les réseaux sociaux à s’améliorer. « Les problèmes sont solubles », assure-t-elle.

Alexandre Piquard

Zeptow
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2 ans

https://www.lemonde.fr/pixels/article/2021/10/05/devant-le-congres-americain-une-lanceuse-d-alerte-compare-facebook-a-l-industrie-du-tabac-et-appelle-a-sa-regulation_6097257_4408996.html

Devant le Congrès américain, une lanceuse d’alerte compare Facebook à « l’industrie du tabac » et appelle à sa régulation

L’audition au Sénat de Frances Haugen, qui a transmis des milliers de pages de documents internes de l’entreprise à des médias et des régulateurs, était le point culminant d’une série de mises en cause.

Par Damien Leloup et Alexandre Piquard
Publié aujourd’hui à 19h31, mis à jour à 20h05
Temps deLecture 4 min.



Frances Haugen témoigne devant la commission au commerce du Sénat américain, le 5 octobre.

« Quand nous avons compris l’ampleur des dégâts causés par l’industrie du tabac, le gouvernement est intervenu. Lorsque nous avons compris que les voitures étaient plus sûres avec des ceintures de sécurité, le gouvernement est intervenu. » Pour sa première audition parlementaire, mardi 5 octobre, Frances Haugen, l’ancienne employée de Facebook qui a transmis à plusieurs régulateurs et médias des milliers de pages de documents internes du groupe, a donné le ton dès les premières minutes, en comparant les pratiques de ce dernier à celles des fabricants de cigarettes ou d’automobiles.

La formule n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd : Richard Blumenthal. Le sénateur démocrate, qui préside la commission au commerce devant laquelle témoignait Mme Haugen, est l’une des personnes les plus critiques à l’égard de la Silicon Valley et a par le passé dirigé, en tant que procureur, des enquêtes contre l’industrie du tabac :

« La semaine dernière, devant cette commission, la responsable de la sécurité de Facebook, Antigone Davis, nous a dit que ces documents ne constituaient pas une “bombe”. En réalité, ils sont la définition même d’une “bombe”. Facebook et les grandes entreprises du numérique sont sur le point de connaître les mêmes déconvenues que l’industrie du tabac. »

Dans cette métaphore, filée au cours de toute l’audition, l’équivalent de la nicotine et des goudrons était l’« engagement », cette mesure du nombre d’actions réalisées par un utilisateur (partage, clic, commentaire…), scrutée par Facebook, Instagram (propriété du groupe Facebook) et de très nombreuses autres entreprises. D’après Mme Haugen, qui s’appuie sur les documents qu’elle a emportés avec elle, Facebook a systématiquement refusé de mettre en place des politiques pour limiter les conséquences négatives de ses applications dès lors que ces projets risquaient de nuire à l’« engagement » de ses utilisateurs, ou à ses statistiques d’« interactions sociales significatives » (meaningful social interactions), une autre mesure interne de l’activité des utilisateurs. Ce que Facebook conteste.

La riposte de Facebook
Cette audition très suivie a prolongé une séquence médiatique particulièrement négative pour Facebook, qui rappelle un peu le scandale des données détournées par l’agence Cambridge Analytica en 2018. En septembre, les documents copiés par Mme Haugen ont déjà été au cœur d’une série d’articles du Wall Street Journal dénonçant les manquements de Facebook en matière de lutte contre la haine et la désinformation ou encore le rôle d’Instagram dans le mal-être des adolescents – et plus particulièrement des jeunes femmes.

Devant l’écho grandissant de ces enquêtes, Facebook avait alors riposté, évoquant des documents sortis de leur contexte et des recherches encore non abouties. Parallèlement, l’entreprise a toutefois fait marche arrière quant à son projet de créer une version d’Instagram destinée aux moins de 13 ans, mis « sur pause » le 27 septembre. Cette « pause » n’avait toutefois pas vraiment convaincu les sénateurs américains : le 30 septembre, ils ont ainsi auditionné la responsable de la sécurité de Facebook.


Catastrophique pour le groupe, l’audition a vu cette haute responsable éluder chaque question l’une après l’autre, suscitant la colère de sénateurs déjà remontés. Et trois jours plus tard, dimanche 3 octobre, Mme Haugen, restée jusqu’alors anonyme, est apparue à visage découvert dans la très réputée émission d’investigation de CBS, 60 Minutes. Elle y a expliqué continuer à penser que personne chez Facebook n’était animé de mauvaises intentions, mais que l’entreprise devait être davantage régulée.

Transparence, régulation et rôle de Mark Zuckerberg
Quelles conséquences concrètes l’offensive de la lanceuse d’alerte peut-elle avoir sur Facebook ? Il est difficile de le prévoir précisément. Devant la commission, Frances Haugen a plaidé pour imposer à l’entreprise la « transparence » et appelé à réguler l’usage des algorithmes de classement des contenus. Une menace plus sérieuse pourrait toutefois émaner des huit plaintes que Mme Haugen a déposées devant la Securities and Exchange Commission (SEC), le gendarme de la Bourse américaine. Documents à l’appui, elle tente de prouver que Facebook a trompé les investisseurs à propos des discours haineux, des adolescents ou du nombre réel de comptes.

La tempête qu’affronte Facebook pourrait aussi durcir le climat politique américain et servir la plainte antitrust portant sur le rachat d’Instagram et de WhatsApp, ainsi que les projets des parlementaires démocrates de durcir les lois sur la concurrence. Par ailleurs, plusieurs régulateurs ont déjà manifesté leur volonté d’auditionner à leur tour Mme Haugen, comme la commission parlementaire sur l’attaque du Capitole du 6 janvier, qui soupçonne Facebook d’avoir joué un rôle dans l’organisation des militants, mais aussi le Parlement européen.

Enfin, au cours des auditions récentes, certains sénateurs ont semblé vouloir viser Mark Zuckerberg en personne. De multiples questions ont porté sur le degré de connaissance qu’avait le fondateur de Facebook des différentes études montrant les impacts négatifs de ses applications, ainsi que sur son rôle dans certaines décisions contestables accordant la priorité à l’« engagement » par rapport à la sécurité des utilisateurs. Il pourrait à nouveau être convoqué par une commission parlementaire, pour une session à haut risque, comme lors du scandale Cambridge Analytica.

Damien Leloup et Alexandre Piquard

KsiiKsii
KsiiKsii
2 ans

Pressés de voir tout le battage de couilles de ces infos

anonyme
anonyme
2 ans

@KsiiKsii: Déjà je me demande combien de personnes savent qui sont Snowden et Assange... Ils se sacrifient pour peau de balle.

NSF1978
NSF1978
2 ans

Très intéressant merci. Après je crois que les gens s'en foutent :'(

Zeptow
Zeptow
2 ans

@NSF1978: Ouai ça s'est passé hier et demain les gens auront déjà oublié, mais bon pour une fois que ça bouge dans les gafam.

Poutine
Poutine
2 ans
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