Le Khaganat de Mongolie, 1913

Pour l'histoire du Khaganat de Mongolie :

Dès la fin du XVIIIe siècle la Russie chercha à devenir une puissance dans l'Est de l'Asie, place occupée par la Chine. L'empire Russe parvint néanmoins à augmenter son influence grâce au Traité d'Aigun en 1858 qui lui donna accès à la mer du Japon ainsi qu'un frontière directe avec la Corée.

L'Empire chinois dirigé par les Qing, très affaibli, est au bord de l'effondrement quand une révolution éclata en 1911. Les provinces déclarèrent leur indépendances les unes après les autres et la Russie y vit alors une aubaine pour augmenter son influence et son pouvoir dans la région. Pour ce faire, le Tsar apporta son soutien à des seigneurs de la région d'Ourga qui nommèrent le Bogdo-Gegen roi.

La société mongol était très proche de celle du Tibet, ils étaient bouddhistes et avaient leur chef suprême, le Bogdo-Gegen, l'équivalent du Dalaï-Lama. Ce qu'on appelait « Mongolie » à cette époque était en fait le protectorat chinois de Mongolie, divisé en deux : Mongolie extérieure au Nord (ME) et la Mongolie intérieure au Sud (MI). Le protectorat longeait la muraille de Chine et s'étalait quasiment du Pacifique jusqu'à l'actuel Kazakhstan, rien à voir avec l'actuelle Mongolie. Ce fut donc à Ourga (ME) que le Bogdo-Gegen devint Bogdo-Khan (« roi ») en 1911, créant alors le Khaganat de Mongolie, un Etat théocratique regroupant une partie de la ME.

La Mongolie-Extérieure fut elle-même coupée en deux, le Tannou Touva (Nord-Ouest) d'un côté, et le reste de la ME de l'autre. Sous la pression des russes, la toute jeune République de Chine se voit contrainte de reconnaître ces deux entités. Une révolte éclata en MI mais à cause d'un pacte avec le Japon, la Russie ne put intervenir.

Le Khaganat et Tannou Touva tombèrent très vite sous l'influence russe, économiquement et militairement, jusqu'en 1917. A ce moment là, les soviétiques prennent le pouvoir, et Lénine annula tous les traités entre la Russie et le gouvernement théocratique de Bogdo Khan en 1919. La Chine en profita pour envoyer son armer occuper de nouveau Ourga et Bogdo fut assigné à résidence. Sauf qu'en février 1921, une coalition de l'armée blanche (russes tsaristes) et de Japonais -tous deux voulant réduire l'influence de la Chine- chassèrent les troupes chinoises et remirent Bogdo Khan à la tête du pays.

Ce fut de courte durée puisque cette fois-ci ce furent les soviétiques qui entrèrent en jeu. Les communistes organisèrent une révolution largement influencée par des membres de l'URSS en créant le Parti Révolutionnaire du Peuple Mongol (PRPM), dirigé par Sükhbaatar. Ils prirent Ourga en juillet 1921, cette même année le Tannou Touva tomba aux mains des communistes également. Bogdo Khan est gardé en place mais tous ses pouvoirs sont abolis. Sükhbaatar mourut prématurément en 1923 et Bogdo l'année suivante. Au lieu de faire des élections, le Khaganat de Mongolie fut directement annexé à l'URSS le 26 novembre 1924, suivit du Tannou Touva le 11 octobre 1944. Le Khaganat aura donc duré de 1911 à 1924.

Par la suite, en l'honneur de Sükhbaatar, Ourga fut rebaptisé « Héros Rouge », c'est-à-dire Oulan-Bator, capitale actuelle de la Mongolie. L'ex Khaganat prit son indépendance en 1992 et devint la Mongolie que l'on connaît maintenant.

La Mongolie de l'Empire Qing est aujourd'hui éclatée en trois partie : la Mongolie-Extérieur étant l'Etat de Mongolie, la Mongolie-Intérieur étant en Chine, et la République du Touva étant en Russie. Cela explique également pourquoi il y a plus de mongols en Chine (5,8 millions, en MI) plutôt qu'en Mongolie, où ils ne sont que 2,7 millions. En réalité, la Mongolie actuelle n'a rien à voir avec le célèbre Empire Mongol, est n'est ni le fruit de revendications nationalistes ou ethniques, mais uniquement le résultat d'une guerre d'influence entre la Russie et la Chine.

Toutes les photos ci-dessous ont été prises par Albert Kahn lors de son voyage dans la région de Ourga, en juillet 1913.