Je comprends pas... Avec tout cet enrichissement culturel, ces investissements réfléchis, cette valorisation du travail... On devrait se sentir grandi, heureux et serein pour l'avenir.
Il y a beaucoup de bonnes choses aujourd'hui ...mais y'en a aussi un paquet qui étaient mieux avant !
Mondialisation, insécurité, éducation... Les Français de plus en plus nombreux à penser que c’était mieux avant
DÉCRYPTAGE - Le pessimisme se stabilise à des niveaux élevés dans le monde, et plus particulièrement en France, selon une étude Ipsos Global Trends.
Les Français sont de plus en plus tournés vers le passé. Selon la grande enquête Global Trends réalisée chaque année par Ipsos, seulement 13% d’entre eux se dit optimiste concernant l’avenir du monde et 21% pour celui du pays. La nostalgie est en constante augmentation en France depuis 10 ans. Selon Ipsos, 64% des habitants de l’hexagone «aimeraient que leur pays redevienne comme autrefois», un niveau en hausse de 8 points en 10 ans, plus que partout ailleurs dans le monde. Beaucoup se montrent très largement critiques vis-à-vis des bénéfices de la mondialisation. Ils ne sont en effet que 34% en 2024 à affirmer qu’elle leur est bénéfique, contre 40% en 2022. C’est le score le plus faible observé sur les 50 marchés étudiés, avec 26 points d’écart avec la moyenne mondiale.
Alors comment expliquer une telle morosité ambiante ? Pour l’essayiste Jérôme Fourquet, auteur de La France d’après, notre pays «est un peu en panne d’un grand récit». «On est dans cette espèce d’entre-deux où on sait ce qu’on a quitté mais où on n’est pas encore sur quelque chose de totalement stabilisé. Nous avons basculé dans un monde en rupture avec des continuités plus anciennes», explique-t-il à ce sujet sur France Inter. Un sentiment effectivement ressenti par beaucoup, à l’instar de Françoise, pour qui «la mondialisation est un facteur anxiogène». Plus encore dans un contexte où tout le monde «est informé des problèmes en temps réel» via des chaînes d’information sur lesquelles il n’y a qu’«insécurité et conflits armés». La septuagénaire regrette aussi le recul de la place accordée à la spiritualité dans la vie quotidienne des Français. «Il y a moins de religion, au profit d’une recherche du plaisir immédiat», explique-t-elle. Elle déplore également le fait que plus personne ne raisonne «sur une vision à long terme», mais uniquement sur le temps présent. Cette grand-mère de deux petites filles admet qu’en conséquence, sa vie «se rétrécit» désormais «autour et seulement autour sa famille».
Des constats partagés par nombre de nos concitoyens si l’on se fie aux résultats de l’étude «Fractures françaises» réalisées chaque année par Ipsos/Sopra Steria pour Le Monde, la Fondation Jean Jaurès, le Cevipof et l'Institut Montaigne. Selon cette étude, près d’un Français sur deux dit aujourd’hui se sentir appartenir à une France en colère et très contestataire (45%, +9 points en un an) tandis que le sentiment d’une France en déclin est aussi en forte hausse (82%, +7 points). «Ces résultats ne sont pas très surprenants, et sont directement liés à des sujets de la vie quotidienne comme l’éducation, la santé, la sécurité, l’immigration», explique Pierre Latrille. Selon le chef de groupe au département opinion et politique d’Ipsos France, le «sentiment général» d’une situation qui «se dégrade» est «très partagé». «Les Français sont très pessimistes, et nombreux à penser que le système de santé est de plus en plus déficient, qu’il y a trop d’insécurité dans le pays ou que l’immigration est un problème», avance l’expert. Rien d’étonnant donc qu’il y ait une proportion très importante de Français «s’inspirant des valeurs du passé». Et ce, «quels que soient la proximité partisane et même l’âge des sondés, même si cela reste évidemment plus fort chez les sympathisants du Rassemblement national ou des Républicains».
«Beaucoup pensent que les gens se détachent du travail, mais c'est faux» : malgré les idées reçues, les Français veulent toujours faire carrière : http://www.lefigaro.fr/conjoncture/beaucoup-pensent-que-les-gens-se-detachent-du-travail-mais-c-est-faux-malgre-les-idees-recues-les-francais-veulent-toujours-faire-carriere-20240923
Fortes inquiétudes pour les futures générations
Jeune grand-mère, Monique s’inquiète davantage «pour les générations à venir» que pour elle-même. Elle confie volontiers regretter les méthodes de l’enseignement d’autrefois, sans doute plus strictes mais grâce auxquelles les enfants sortaient diplômés et armés pour l’avenir. Un sentiment partagé par une majorité de ses compatriotes, puisque 73% d’entre eux estiment «que la qualité du système éducatif s’est dégradée par rapport à l’époque où ils étaient élèves». «Ce n’est pas anodin si les écoles privées connaissent un regain d’intérêt ou que l’uniforme revient à la mode», estime Marc, persuadé que l’inquiétude des parents pour leur progéniture les pousse à les inscrire dans les établissements privés plutôt que publics.
Leurs préoccupations ne se cantonnent d’ailleurs pas à l’éducation. Selon le baromètre de la pauvreté réalisé pour le Secours Populaire chaque année, les Français restent toujours aussi pessimistes sur le fait que leurs enfants puissent un jour vivre dans la précarité. Ils sont même jusqu’à 79% à penser que ce risque est «plus élevé» que pour leur génération. «Ce qui est certain et ce que l’on voit très bien à travers l’enquête du Secours Populaire, c’est que les enfants vivent aujourd’hui moins bien que leurs parents», décrypte Pierre Latrille. Pour cet expert d’Ipsos France, «il existe un vrai sentiment que la génération future aura moins bien accès que la précédente à des revenus suffisants, à un logement et à un travail, et que cela ne va pas aller en s’arrangeant».
C’est exactement ce que ressent Héloïse qui peine à joindre les deux bouts, malgré son travail salarié. «On m’avait dit : “fais de longues études, tu trouveras un CDI et tu seras à l’abri”, mais la vérité, c’est qu’aujourd’hui, ça ne suffit plus pour bien vivre. À deux avec un enfant, on n’arrive pas à mettre de l’argent de côté et on réfléchit à deux fois avant de partir en vacances», témoigne cette cadre supérieure de 35 ans. Même discours chez Angela. À 26 ans, elle assume de dire que «la vie est dure» pour sa génération. «Tout le monde fait des études, ça donne l’illusion que tous pourront avoir de bons jobs et réussir mais la réalité est autre surtout si tu n’as pas de réseau et les salaires ne sont pas meilleurs qu’avant», relève la jeune femme. Selon elle, la situation est encore pire dans les grandes villes, où les prix très élevés de l’immobilier empêchent les plus jeunes d’investir et donc de s’enrichir.
Des incertitudes économiques confortées par l’étude Global Trends, qui pointe que 73% des Français pensent que la trajectoire de l’économie tricolore prend une mauvaise direction. C’est 11 points de plus que l’an dernier. Pour autant, tout n’est pas si négatif si l’on en croit l’étude, puisque 55% des Français se disent fiers de leur pays, contre 50% en 2019. Certains sont même plutôt radicaux sur la question, s’interdisant de vivre dans le passé. «Dire que c’était mieux avant, c’est refuser le progrès et tout ce qu’il y a de bon aujourd’hui», lance Alain, pour qui la plupart des gens «ont juste peur de vivre avec leur temps». Et d’ironiser : «ceux qui disent “c’était mieux quand les jeunes ne passaient pas la journée sur leurs téléphones” sont les mêmes qui leur achètent des téléphones pour être sûrs qu’ils soient bien rentrés après l’école».