A la source d’une légende : Sainte-Mesme

Au IVème siècle vivait un roi Franc... Rex crignitus, les dieux avaient fait sa fortune et sa lignée était assuré par deux enfants : Mesme, sa fille, et Mesmin, son fils. Lueurs d'espoir en un âge sombre elle s'estompa toutefois devant le caractère étrange que prit sa fille en grandissant. Brillant par ses absences, d'obscures rumeurs commencèrent à voir le jour... Un servant finit par rapporter celles-ci au souverain.
Le visage du roi s'assombrit... L'âme de Mesme brûle d'une autre foi. En furie, le roi rugit et vocifère la malédiction qu'il lui porte : il la condamne à mort. Mesmin terrifié chevauche jusqu'à la clairière où se recueille sa sœur. D'abord inquiète au bruit des sabots, elle s'apaise à la vue de son frère et reprend sa prière. Il ne sait comment lui annoncer le terrible édit... Il pose une main réconfortante sur son épaule et l'égorge d'une oreille à l'autre. Mesme s'effondre et Mesmin achève son œuvre, décollant la tête de sa sœur. Il observe celle-ci gisant au sol... Au fond... Qui a véritablement perdu la tête dans cette histoire ? Le père commanditaire ? Le frère exécutant ? La sœur martyr ? Le Saint Esprit a quitté cette terre en même temps que le dernier esprit sain. Pris de remords il enterre la tête, sanglote et s'en va. Des larmes de Mesmin une gouttelette persiste et, fait rare... Elle grossit ! Une source naquit là où la tête de sa sœur repose. Attisant la foi des habitants, la source devint fontaine et la sœur devint sainte... Sainte-Mesme, patronne du village du même nom.
Mesmin, ne rentra pas au palais... Montant sur les hauteurs du village, il trouva refuge dans les bois et se convertit au Christ. Il y vécu dans le dénuement, se nourrissant de châtaignes, de champignons et de baies. De sa forêt, reclus en ermite, il put chaque jour se confesser en observant la source de ses maux... Tandis qu'une seconde grandit sous ses lamentations. Point de culte ni de fête pour celle-ci, mais une forêt dévorante plongeant y ses racines.

Ceci est la légende de sainte Mesme, quelque peu romancé.
Dans les faits ces personnages n'ont sans doute pas existé, ou pas de la sorte...

Le roi, Dordanus (j'ai évité de citer son nom pour des raisons de dramaturgie évidente), qui aurait donné son nom à Dourdan est vraisemblablement un mythe. Il trouverait ses racines dans le moyen-âge et viserait à justifier le caractère royal de la ville (berceau des capétiens). "Dourdan" serait plutôt d'origine celte "dor/dour" signifiant eau/rivière et "dan" colline.
Mesme et Mesmin seraient plus que frère et sœur… il serait en réalité la même personne, Mesme et Mesmin n’étant qu’une variation du même prénom masculin, pour lequel le village portait sans doute un culte. La finale muette de Mesme aurait entraîné la féminisation de l’épithète. Saint-Mesme est devenue Sainte-Mesme. Le nom de lieu qu’il fallait bien justifier a donné naissance à notre sainte. Doubles d’un même nom, Mesme et Mesmin ont été réunis par d’étroits liens de parenté pour les besoins de la légende.

Par ailleurs saint-Mesmin n’est pas originaire de Dourdan mais plutôt de Verdun. Afin de coller à la légende son origine aurait été modifié, devenant un repenti du pays en proie avec ses démons avant de devenir le saint terrassant le dragon de la grotte de Béraire,

La fontaine de Sainte-Mesme (en image) date du XVIème siècle. La statue qui est dessus est plus récente : il s’agit d'un moulage en plâtre effectué en 1962 afin de pouvoir préserver l'originale en bois que le temps dégradait. Celle-ci a pu trouver refuge à l'église du village... Pour un temps. Car elle y fut volée en 1985.