Exutoire

Dénué de sens et d'intérêt ma vie s'écoule, chacune de mes inspirations suivies de chacune des mes expirations mécaniques gonflent et vident alternativement mes poumons de cet air pourri embaumé de solitude à peine maussade. Mon cœur, à qui l'on prête bien trop de symbolique pour une pompe à sang, bat inlassablement afin de faire circuler ce fluide maudit à travers mon corps, encore et encore tel à une machine insensible et dénué de conscience.
Même immobile, je suis toujours en mouvement, je suis vivant car mon système fonctionne, mes poumons renouvelle mon oxygène que mon cœur redistribue irriguant notamment mon cerveau qui paraît-il est le seul morceau de mon être à avoir conscience de moi-même. Cerveau maître de mes pensées, contrôlant mes doigts tapotant le clavier étouffant de mon ordinateur portable. Cerveau responsable de mes angoisses et mes sentiments, solitude, vide, ennui, agacement, manques.
Le temps est immobile, neutre et pourtant on croit le ressentir, notre existence ayant techniquement un début et une fin.
Mais l'existence n'est qu'un événement, bref ou long selon l'échelle ou le ressenti, qui n'advient qu'une seule fois sans raison ni projet car ses conséquences sont dérisoires.
Beau nombres d'individus savent se convaincre du contraire, mais je ne sais plus le faire, en tout cas là, je n'en ai pas envie.
Je me sens seul, inutile et emporté par la vie en société comme une feuille morte par le vent d'automne. La vie est belle, magnifique même parfois car elle permet de ressentir des émotions fortes qui nous donnent des vertiges d'illusions d'existence, nous existons certes mais pas plus que le caillou ou que la barre espace de mon clavier qui se fait marteler depuis tout à l'heure sans rien à pouvoir redire de son destin.
La vie est belle comme une fleur, jusqu'à ce qu'un jour elle fane, mais il reste des tas d'autres fleurs des tas d'autres vies. La Vie avec un grand V elle n'est ni belle ni moche, elle n'est qu'une existence soudaine essayant de perdurer dans le monde qui l'entoure et s'articulant autour d'innombrables êtres essayant de perdurer dans les mondes qui les entoure.
Je suis l'un d'eux, mais ne saisissant pas ma fonction tout en ayant conscience de moi même je m'ennui.
Insignifiant mon existence n'a de raison que pour moi même et cela m'ennui sans être pénible comme ça l'a été par le passé, simplement ennuyeux. La mélancolie me manque, un mal-être dérisoire vaut mieux qu'un état neutre. Je l'ai perdue, j'ai guéri je crois. Je crois aussi que je regrette.
Être incapable de me libérer des problèmes futiles dans lesquels cette espèce de depression me cloîtrait m'assurait de ne pas me retrouver face à l'immensité de la réalité et son inconsistance merdique.
J'en ai plein le cul de respirer pour respirer, de pomper du sang pour pomper plus de sang jusqu'à ce que je n'en sois plus capable. La prison sociale m'empêchant de me foutre en l'air je reste là, las, à attendre que j'oublie tout ça, que je me remette à être conditionné par mon espèce et sa société branlante qui n'a jamais été autre chose qu'une façade bonne qu'à tuer le temps.
J'ai besoin d'une issue, l'alcool ne marche plus l'amour me laisse un goût amer, ma mélancolie me manque j'ai tout perdu avec elle, je me suis relevé pour voir que les étoiles sont toujours aussi loin debout qu'affalé sur le sol humide d'une rosée du matin qui réveille le corps ivre d'un adolescent qui détruit sa "vie".
Je vais mieux et c'est de la merde, le monde ses lois et la Vie sont toujours les mêmes et ce dernier fardeau reste toujours aussi lourd même si je souhaite un peu moins sa fin.
Je finirai bien par mourir mais putain qu'est-ce que c'est chiant.