Un rêve qui laisse des traces

Dans ce rêve je me suis retrouvé dans un petit jardin plutôt sympatique, quelques bosquets bien taillés ne dépassaient pas mes genoux, une mare où s'épanouissaient des nénuphars. Parfois un poisson rouge apparaissait au hasard des rares endroits où il était possible de le voir tant la végétation était dense. Tout autour de grands murs de pierre, comme dans l'enceinte d'un vieux château, ce qui n'empêchait pas de profiter du soleil d'une aube timide. Je suis avec une inconnue, une jolie inconnue, qui se tient à côté de moi, tous deux debouts, silencieux.

Elle semble... Déprimée. Je suis certain que c'est la première fois que je la vois mais engager la conversation semble une bonne idée. Je lui demande si elle va bien, ce qu'elle fait ici. Un sourire douloureux m'a répondu, et quelques trivialités.

"ça va, je ne sors pas souvent, ça fait du bien un peu d'air frais"

Ha oui c'est vrai, elle est prisonnière. Tout du moins captive. Je me rends pas compte qu'il est tout de même étrange de savoir ce genre de choses sur une personne que l'on rencontre à peine. A moins que ce soit le lieu ? D'ailleurs qu'est ce que je fais là ? Aucune idée. Je ne sais pas comment je suis arrivé. Mais je sais que cet endroit est une aire de sortie pour des détenus.

En tout cas ses mots étaient empreints de tristesse, elle était dans la retenue, comme à deux doigts de craquer.

Les vêtements qu'elle porte ne trahissent pas sa condition, un jean bleu et un pull blanc à col roulé, de longs cheveux châtains qui s'agitent faiblement sous une brise qui a oublié qu'il y avait des murs tout autour de nous. Des murs. Pas la moindre sortie. Pas la moindre entrée.

Silencieusement et sans savoir pourquoi j'entame un petit tour des lieux, m'attarde à la contemplation de telle ou telle plante. Elle me suis. Maintenant une certaine distance. Comme si elle avait peur que je la touche par mégarde.

L'athmosphère est pesante, il fallait que je brise le silence. D'autant que j'aimerais bien qu'elle aille mieux. Parce que clairement elle n'allait pas bien, elle tire la même tête qu'une personne endeuillée trop fière pour se laisser aller aux larmes.

Je lui demande à nouveau si elle va bien, hochement de tête affirmatif, et recommence un tour du petit jardin, lentement, en prennant mon temps d'une manière qui ne me ressemble pas. Alors que je me tourne vers elle pour lui demander si elle avait besoin de quelque chose, je surprends le regard qu'elle me tend. Un regard que je qualifierais de partagé. Déchirée mentalement entre deux impératifs quasi-vitaux. Oui, en tout cas c'est ainsi que je l'ai ressenti. Instantanément elle porte ses mains à son visage et détourne les yeux, consciente de son erreur, mais trop tardivement.

Bon maintenant ça suffit, j'avance vers elle et je suis surpris de voir qu'elle ne recule pas. J'étais persuadé qu'elle le ferait si je m'approchait, force est de constater qu'elle reste plantée là, les yeux fuyants, ses mains descendant vers son cou en tremblant, comme si elle avait peur de ce qui allait se passer mais qu'elle en avait les jambes pétrifiée.

"Qu'est ce qui ne va pas à la fin ? Je ne pourrais sans doute rien faire mais parlez moi au moins ! Peut être que ça vous fera du bien ?"

C'est peut être sorti plus violemment que je ne l'aurais voulu, mais trop tard pour faire marche arrière. C'est à ce moment qu'elle attrappe le col de ma chemise pour s'y accrocher de toutes ses forces, sur son visage coulent des larmes et des sanglots commençent à la secouer. Je me rends compte qu'elle ne tient qu'à la force de ses bras, ses jambes ne semblent plus la porter et pour une raison que j'ignore je n'ose poser mes mains sur elle pour alléger le poids qui tire sur mon vêtement et éviter qu'elle tombe.

Elle me crie alors, s'y reprennant à plusieurs fois en raisons de ses pleurs.

"Tweeeen ! Tu... Tu... TU M'AS ENCORE OUBLIEE"

J'ouvre les yeux et me redresse dans mon lit d'un seul mouvement, aussi violent qu'un réflexe. J'ai le souffle court, comme si je venait de piquer un sprint, le palpitant qui tambourinne violemment dans ma poitrine, les oreilles qui sifflent. A ce moment je suis persuadé que ce rêve n'en était pas un, des milliards de questions s'enchevêtrent dans ma tête.

J'ai la certitude que cette personne a occupé une place très importante dans ma vie.

Et je l'ai encore oubliée.