Yohan, ce zadiste dépité par la «lutte des classes» au sein de la communauté
L'article : Même s'il veut rester sur place, Yohan*, sous couvert d'anonymat, livre un témoignage quelque peu désabusé de sa vie sur la ZAD. Venu avec l'espoir de goûter à une vie en collectivité, libérée de toutes les contraintes de notre société, il y retrouve finalement dit-il, «ce qu'il voulait fuir». Le pouvoir hiérarchique et même l'émergence de classes sociales existent, selon lui, au cœur de cette communauté de 300 âmes qui brandit pourtant l'égalité pour tous.
«Pour prendre la moindre décision, il y a des réunions à répétition. Il y a l'assemblée des usages, le conseil pour le maintien des occupations et c'est en réalité une poignée de personnes qui décide à chaque fois. Le pouvoir n'est pas horizontal mais bien vertical», dit-il. Mercredi dernier, sous un barnum tenant lieu de salle de réunion, le ton serait d'ailleurs monté pour dénoncer trop de décisions adoptées sans concertation. La ZAD qui défend bec et ongles un mode de vie expérimental, aurait donc du mal à vivre au rythme de ses propres principes: égalité, solidarité, partage…
«Du coup, les règles ne sont pas les mêmes pour tous», assure encore Yohan en rappelant un événement qui a fait le tour de la ZAD. Fin mars dernier, l'un des occupants illégaux a été exfiltré sans ménagement des bocages. Roué de coups, ligoté et placé dans un coffre, ce dernier a été abandonné quelques kilomètres plus loin devant les portes d'un hôpital d'une ville voisine. Même si les zadistes ont toujours éludé les questions relatives à cet épisode, Yohan relaie ce qui s'en dit. «Contre l'avis qui avait été pris, celui qui a été violenté avait détérioré la route des Chicanes, la fameuse RD 281 qui avait été remise en état. Alors certains lui sont tombés dessus», dit-il en poursuivant: «ceux qui l'ont viré sont les mêmes qui aujourd'hui font des trous ailleurs sur les routes, en prévision d'une éventuelle deuxième opération d'expulsion, pour empêcher les blindés de passer.»
La première série d'expulsions, survenue en avril dernier, lui a, dit-il, fait perdre quelques illusions. Son habitation de fortune avait alors volé en éclats sous les coups des pelleteuses qui, encadrées par les gendarmes mobiles, avaient «nettoyé» la partie sud-est de la ZAD. «C'était le coin des petites gens, dit-il. Ces derniers étaient installés le long de la route des Chicanes, dans une forêt, dite la zone non motorisée. Dans ce bois, il y avait les plus fragiles, les laissés-pour-compte de la société et aussi des gens qui ne sont pas bien dans leur tête car il y a pas mal de dinguerie sur la ZAD.» Lors de l'intervention des gendarmes, Yohan estime avec amertume que la communauté ne s'est pas trop mobilisée pour défendre «ce coin des pauvres, de ceux qui n'ont jamais leur mot à dire et qui, ici comme ailleurs, dérangent».
«Les bobos intellos sont au cœur de la ZAD, les riches au sud-ouest»
Prenant soin de rappeler qu'il livre à chaque fois sa propre vision, Yohan étrille la ZAD. Il n'hésite pas à décrire une communauté hiérarchisée qui s'est figée dans des quartiers bien distincts. «Les bobos intellos sont au cœur de la ZAD, les riches au sud-ouest, les diplômés qui ont le pouvoir sont à l'ouest dans le secteur de Bellevue», dit-il. Il ironise: «Et c'est donc le quartier des plus démunis qui a été le premier rayé de la carte. Finalement, la lutte des classes existe aussi ici.»
Depuis que son lieu d'habitation a été détruit avec tous ses effets personnels, Yohan a depuis trouvé un nouveau point de chute sur la ZAD. Tout en continuant à participer à cette vie collective, il en est aussi un observateur critique. «Peut-être que je partirai un jour, dit-il. Mais pour l'instant, je reste. Je veux poursuivre l'expérience.»
(*Le prénom a été changé)
@PoloRalphLo: intéressant retour. Malgré un esprit très pragmatique je reste persuadé qu’il faut des gens qui pensent rêvent inventent mais j’ai toujours autant de mal avec le concept de la ZAd où tous les fatigués de la société qui n’ont déjà pas réussi à affronter se bas monde imaginent qu’ils vont trouver la recette miracle pour échapper à leur sort à base de je dors dans la boue ou le 17ème siècle c’etait mieux. C’est bien naïf tout ça.
Merci pour cette box, article très instructif et qui prend soin de rappeler qu'il livre à chaque fois sa propre vision des faits.
@sooN: Un film qui divisent, certains aiment, d'autres détestent.
https://youtu.be/_KVDDXT5gYk?t=468
@LaRascasse: il m'a fait beaucoup penser aux films de 1981 "Malevil", pour le côté survivants campagnards et "Les babas cools" pour le côté babos qui ont bien plus de défauts qu'ils ne veulent se l'avouer.
La fin du film est un peu décevante, mais le film a effectivement des moments cultes, et certains acteurs sont excellents.
@blackbird: Etre utopique, c'est vouloir mettre en oeuvre les mêmes idées depuis deux bons siècles et surtout penser que "cette fois, ça va marcher" alors que l'on sait précisément, avec de nombreuses preuves à l'appui, qu'elles sont destructrices pour l'écosystème et les sociétés humaines. C'est hallucinant cette condescendance envers les gens qui tentent de penser et d'agir différemment. Personne n'est assez fou pour dire que le communisme (ici à la ZAD) est la promesse d'un paradis sur terre. Il propose seulement un autre modèle avec ses qualités, mais aussi ses défauts, que les concernés tâchent de résoudre.
Notre monde pue la merde et pousse l'espèce vers son extinction, et t'as des gens qui n'ont jamais rien fait de leur vie pour mettre en application leurs idées (je ne parle pas de toi, je ne te connais pas) et leurs principes, se contentent de râler sur leur canapé en hurlant quand le gouvernement fait ceci, quand des gens se battent contre le gouvernement, quand les riches sont plus riches, quand des gens caillassent un MacDo, etc. Ces mêmes passifs se permettent de te donner des leçons quand, toi, minimalement, tu essaies d'agir. Franchement c'est insupportable.
Haha, les babos qui veulent faire la morale mais qui sont pire que ceux qu'ils dénoncent
@Azertsix: C'est bien là que c'est pire au final! On le sait que les hypocrites sont au pouvoir, mais quand tu prétends vouloir révolutionner le monde tu évites de te conduite de la même manière que tes oppresseurs
Commentaire supprimé.
Mais qui peut franchement croire que l'humain pourra un jour vivre de décisions collégiales et de pouvoir partagé, sans aucune forme de hiérarchisation ? C'est pas possible ça mon pote. Bienvenue dans la réalité. La vie est un combat.
@Billydemerde: Plusieurs études tendent à dire que c'est possible pour des groupes de personnes de ne dépassant pas les 100 personnes.
On fait plein de petites tribus, on part vivre dans des cavernes et c'est bon
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