Lady Triêu, la Jeanne d'Arc du Vietnam

Lady Triêu est la preuve vivante - enfin maintenant elle est morte - que les femmes peuvent aussi avoir une grosse paire de couilles. À 20 ans, cette jeune vietnamienne part s'entraîner dans la montagne façon Bruce Lee pour mieux chasser l'envahisseur chinois de son pays, en chargeant les ennemis à dos d'éléphant une épée dans chaque main.


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Chine, An 220. La dynastie Han s’effondre après 14 ans de règne. C’est le début de la période des Trois Royaumes de Chine. Les royaumes de Wei, Wu et Shu s’affronteront pour le contrôle du pays pendant 60 ans, jusqu’à sa réunification par la dynastie Jin en 280.

Mais ce n’est pas l’histoire des Trois Royaumes qui nous intéresse aujourd’hui.

En l’an 225, la jeune Triêu Thi Trinh vient au monde dans la province de Thanh Hoa, au nord du Vietnam, alors contrôlée par le Royaume de Wu. Ses parents décèdent alors qu’elle n’est qu’une enfant. Elle grandit sous la tutelle de son grand-frère et de sa femme, que l’on disait violente et tyrannique. Une orpheline sous le joug de son affreuse belle-mère, ça aurait pu inspirer un Disney si seulement Triêu avait été blanche.

En 244, Triêu Thi Trinh fête ses 19 ans. Enfin, fêter est un bien grand mot. Elle était sûrement en train de plumer un poulet ou de récurer des sols sous les coups de tatanes de sa belle-mère. Sauf qu’un beau jour, cette dernière pousse le bouchon un peu trop loin comme Maurice. C’en est trop pour la jeune fille, qui assassine la femme de son frère façon bouchère avant de s’enfuir dans les montagnes vietnamiennes.

Là, à seulement 19 ans, Triêu Thi Trinh se met en tête de libérer le Vietnam de l’oppression chinoise. Forcément, vu de l’Occident, c’est difficile de comprendre l’intérêt de remplacer un pouvoir de bridés par un autre. Mais bon voilà, les Chinois occupent le pays depuis plus de 200 ans et les Viets l’ont un peu mauvaise. Le Viet est petit, mais le Viet est fier.

Durant près d’un an la jeune Triêu vit recluse dans sa montagne à manger des racines et des cailloux, ce qui devait être le régime alimentaire moyen pour un Vietnamien en l’an 1769 avant Uber Eats. À ses heures perdues - donc toutes - elle s’entraîne aux arts de la guerre et à monter des éléphants sauvages. C’est sûr que ça a moins de gueule que de finir Top 1 sur Fornite mais à l’époque on s’occupait comme on pouvait.

Les villages alentour ont écho de cette étrange jeune femme qui s’exerce nuit et jour pour botter le cul de la racaille chinoise. Nombreux sont les hommes qui décident de rejoindre sa cause, par amour de la liberté et sûrement un peu parce que c'était plus divertissant que de bosser dans une rizière. La rumeur remonte également aux oreilles du frère de Triêu, qui décide de se rendre dans la montagne pour la convaincre de rentrer à la maison, de fermer sa gueule et d’ouvrir ses jambes pour faire des enfants parce que hé ho faudrait pas oublier qu’elle est une femme. Mais lorsqu’il arrive au camp militaire, la jeune chef de guerre lui assène un sermon qui restera dans la légende :

“Je ne me résignerai jamais à ce que des femmes courbent l'échine pour devenir de simples concubines. Je veux suivre les vents puissants, tuer les baleines de la Mer de l'Est, combattre les Wu et gagner l'indépendance.”

Le frérot se sent pousser des ailes comme s’il venait d’entendre le discours de d’Aragorn à la Porte Noire et décide de prendre les armes aux côtés de sa frangine. À 23 ans, Triêu Thi Trinh est à la tête d’une armée de plus de 1.000 hommes et gagne le titre honorifique de Lady Triêu, qui est encore ancré dans la culture populaire vietnamienne de nos jours.

Et c’est là que les choses sérieuses commencent.

Nous sommes en l’an 248. Le Royaume de Wu oppresse tranquillement le nord du Vietnam et ne s’attend clairement pas à un début de révolution. Et encore moins sous la forme d’une jeune Viet à la robe dorée qui surgit de la forêt à dos d’éléphant, une épée dans chaque main et des centaines d’hommes enragés derrière elle.

Vous l’aurez deviné, les Chinois prennent la raclée de l’année et se voient obligés de battre en retraite. Le Royaume de Wu fait venir des renforts, qui se feront botter le cul en bonne et due forme par la “Femme Général à la robe d’or” de son nouveau surnom.

Les mois qui suivent, Lady Triêu enchaîne les attaques surprises et va même jusqu’à assiéger des cités fortifiées aux mains des Chinois. La légende de Lady Triêu se propage à travers le pays aussi rapidement que la terreur dans les rangs chinois. On parle d’elle comme d’une femme à trois seins qui mesure deux fois la taille d’un homme, et dont la seule voix est capable d’instiller la peur dans le cœur de ses ennemis.

Malheureusement, à la fin de l’été 248, c’est le début de la fin pour Lady Triêu. Le Royaume de Wu soudoie les hommes prêts à déserter les rangs de la jeune femme, et de nombreux autres décident de rentrer auprès de leurs familles. L’hiver arrive, et la liberté c’est bien mignon mais ça ne se mange pas.

Lady Triêu est extrêmement affaiblie, et le Royaume de Wu en profite pour mener une expédition punitive. La jeune fille est prise en embuscade près d’une rivière et, acculée, elle choisit de se donner la mort en se jetant à l’eau. La plupart des vietnamiens ne savent toujours pas nager aujourd’hui (true story), alors vous imaginez bien qu’il y a plus de 1500 ans c’était pas glorieux non plus. Une autre version raconte qu’elle s’est laissée piétiner par son éléphant de combat. Le Royaume de Wu tentera quant à lui de salir sa mémoire en faisant courir le bruit qu’elle était effrayée par les pénis, et que les soldats chinois ont eu l’avantage en chargeant complètement nus.

L’histoire raconte que le fantôme de Lady Triêu a hanté les nuits du commandant chinois responsable de sa mort jusqu’à la fin de ses jours. Ce dernier avait des terreurs nocturnes si violentes qu’il a fait installer cent chibres de bois devant sa chambre pour éloigner l’esprit vengeur de la chef de guerre vietnamienne.

Aujourd’hui Lady Triêu est encore considérée comme une figure révolutionnaire majeure au Vietnam, au même titre que Jeanne d’Arc en France. De nombreuses rues et écoles portent son nom à Hanoi, Hué et Ho Chi Minh City, une fête nationale lui est dédiée et un temple a été érigé en son honneur dans la province de Thanh Hoa - le temple de Bà Triêu (Dame Triêu en vietnamien).


TL;DR : C’est l’histoire d’une jeune vietnamienne de 20 ans qui a décidé de porter ses ovaires pour botter le cul de l’envahisseur chinois à dos d’éléphant.


*Sources :

- https://www.thoughtco.com/trieu-thi-trinh-vietnams-warrior-lady-195779
- https://vi.wikipedia.org/wiki/B%C3%A0_Tri%E1%BB%87u
- https://fr.wikipedia.org/wiki/Tri%E1%BB%87u_Th%E1%BB%8B_Trinh#cite_note-2*